Review L’oracle de la triade de Dominike Duplaa

Le jeu est livré dans une boite de carton souple. Les cartes sont satinées et brillantes. Un petit livret se glisse dans la boîte.

Le jeu de Dominike DUPLAA est édité depuis 1998. Passionné de calligraphie, l'auteur a voulu créer un jeu divinatoire s'appuyant sur un symbolisme mêlant divers courants philosophiques et religieux. Sur les cartes on trouve des détails et symboles appartenant à la tradition judéo-chrétienne, à la Kabbale, aux mythologies de l'antiquité notamment grecque, romaine et de l’Égypte des pharaons.

Le livret est traduit en deux langues, Français et Anglais. Chaque traduction couvre 14 pages. L'auteur écrit une introduction sur deux pages qui n’a aucune valeur ajoutée, il ne dévoile ni son intention, ni la genèse de sa création. Il évoque seulement des généralités sur ce qu'est un jeu de cartes divinatoire. Cette introduction pourrait être convenir à tout autre jeu de cartes.

Une fois n'est pas coutume, l'auteur propose d'abord des méthodes de tirage avant de se consacrer à la signification des cartes. Duplaa décrit 3 méthodes :

• Tirage en triangle : Méthode en 4 emplacements = 1. force en présence, 2. événements proches, 3. issue possible, 4. finalité ou synthèse. Ce tirage ressemble étrangement au tirage en croix, il me paraît trop proche de la 3ème méthode proposée.
• Tirage de la triade : Méthode avec 12 emplacements. Les emplacements 1,2,3 représentent le consultant. Les positions 4,5,6 parlent de l'entourage. Les emplacements 7,8,9 évoquent un conseil, et enfin les cartes 10,11,12 représentent l'issue de la question.
• Tirage traditionnel en croix : Méthode en 4 emplacements = 1. en faveur de la question, 2. en défaveur de la question, 3. force dominante, 4. résultat, 5. synthèse. Cette méthode respecte le format habituel du tirage dit "en croix".

La deuxième partie du livret couvre la signification des cartes en quelques pages seulement. Pour chaque carte, de 4 à 12 mots-clés sont fournis selon la richesse du symbolisme. Il n'y a aucune explication des détails de la carte. Pour cela, il faut se procurer le livre du même auteur qui traite de ce jeu de cartes. Je regrette que le livret soit si court, le graphisme des cartes est chargé avec de nombreux symboles méritant d'être expliqués.

Les cartes ont un graphisme globalement assez dense, avec des détails parfois trop envahissants. Toujours est-il, les cartes que j'aime sont les cartes plus épurées, les moins chargées, les moins ésotériques et dont l'ambiance est neutre, voir agréable à regarder.

La carte est fort simple à comprendre car son élément emblématique est une corne d'abondance qui en effet parle de richesse. Je regrette cependant qu'il n'y ait pas un ou deux détails annexes évoquant d'autres formes de richesse comme des talents artistiques, une sagesse spirituelle, ou encore une forme de bienveillance et de générosité.

Clairement inspirée du monde judéo-chrétien, cette carte affiche deux tablettes (de la loi) et une trompette cernée par deux ailes (le jugement dernier). La symbolique de la carte semble clair, cette référence à la mythologie judéo-chrétienne vient compléter le sens premier du nom de la carte : "Ordre".

J'aime le ciel se confondant avec le sable. La tempête de sable entraîne une perte de repères avec seulement l'horizon et le soleil restant visibles. La carte parle avec justesse de la solitude, de l'isolement, ou encore du vide et de l'absence.

Les feuilles de palmier nous rappellent que le papyrus est tiré de leur matière. Naturellement la barge à voile nous renvoie au Nil et à l’Égypte où est né le papyrus. Cette carte parle judicieusement du papier, de l'écriture, et dans un sens étendu de l'évolution. Mais sans doute que l'auteur va un peu loin en y attribuant aussi le sens des affaires et du commerce. Sans doute, pense-t-il cela avec la barge à voile, qui était très certainement un moyen de transport privilégié pour le commerce durant l'antiquité. Mais ce contexte est très en périphérie du sens initial du mot "papyrus". Fallait-il appeler la carte ainsi ?

Une carte dont l'illustration est un simple fond noir avec un point blanc, figuration qui tient de l'art abstrait, a-t-elle sa place dans un jeu divinatoire ? Cette image veut tout dire, comme elle ne veut rien dire. De plus, l'auteur y attribue des mots-clés plutôt négatifs comme chute, mal, ténèbres, perte. Mots qui renforcent ma réticence vis à vis de cette carte.

La carte affiche une pomme croquée en référence à Eve et Adam au jardin d’Éden. D'ailleurs confirmant cette interprétation, le mot "Sin" ("péché" en Anglais) apparaît sur la carte. Cependant la carte porte le nom "Erreur". Ce titre sème la confusion et même fait l'amalgame entre ce qui tient de l'erreur, de la faute et enfin du péché, qui sont 3 notions pourtant bien différentes.

La carte porte le nom de "Bénédiction" alors qu'y figure une main qui est dans une posture où habituellement elle signifie "STOP, ARRÊTEZ !". L'illustration n'est pour moi par raccord avec la symbolique que l'auteur veut y voir.

Je ne suis absolument pas convaincu par le symbolisme de cette carte. D'abord pardonner ne revient pas à mettre de l'eau sur le feu. Nous savons ce qui survient quand on met de l'eau sur des braises ou sur le feu. Cela ne l'éteint pas forcément mais entraîne bien souvent des projections dangereuses. Selon moi, il faut symboliquement retirer les bûches du feu, afin de cesser de nourrir le feu, la haine, la colère. Pardonner, ce n'est pas s'opposer au feu dévastateur, mais éliminer tout ce qui en est la source. Pardonner c'est évacuer, accepter, réparer ce qui est à l'origine du conflit. De plus le pardon, demande à ce que l'on regarde avec lucidité la situation avec de grands yeux ouverts. Ce qui n'est pas le cas dans l'illustration puisque l'homme a les yeux fermés. Pardonner ce n'est pas méditer ou être dans la passivité. De plus, le drapeau blanc est symbole de paix et non pas de pardon. Bref, l’illustration de cette carte nous parle davantage d’arrêter le conflit. Mais la trêve des combats n’est pas non plus le pardon.

Effectivement les multiples calligraphies sur l'image peuvent nous parler d'une sorte de connaissance initiatique, mais l'oeil au centre de la main, et toutes ces calligraphies indéchiffrables, me font penser à un savoir et une initiation très élitistes.