Emballage
Nom : | Tarot de Marseille Edition Millennium |
Auteur : | Wildried Houdouin |
Editeur : | Edition Trajectoire |
Tradition : | Tarot de Marseille |
Emballage : | Boîte carton dur / 14,5 x 10,5 x 4,3 cm |
Jeu : | 78 cartes / satinées, mattes / 12.4 cm x 6.5 cm |
Taille : | normal |
Manuel : | Livret de 65 pages en couleur |
Endroit/Envers : | Oui, le dos des cartes est réversible |
Inversion 8/11 : | Non |
Univers : | Médiéval / Renaissance |
Utilisation : | Prédiction , Développement personnel |
Lorsque l’on ouvre le boîtier du Tarot de Marseille édition Millenium de Wilfried Houdouin, on découvre un ensemble complet et bien pensé. La boîte rigide, fidèle aux éditions Trajectoire, renferme les 78 cartes accompagnés d’un livret explicatif de 65 pages, riche en couleurs. Un pochon de rangement est également inclus, non pas en tissu classique, mais en nylon résistant, et le fond bleu de la boîte ajoute une touche esthétique agréable.
Les cartes, de taille standard, surprennent agréablement par leur finition satinée, offrant une sensation de qualité et de durabilité. La production, bien que réalisée en Chine, ne semble pas compromettre la qualité de ce tarot.
En tant qu’adepte de la cartomancie et utilisateur régulier d’oracles, notamment le Petit Lenormand, je suis habitué à des cartes de dimensions plus réduites. J’ai une préférence pour les mini-tarots, pratiques pour des tirages rapides et spontanés, que ce soit pour initier des proches ou lors de rencontres impromptues. Même dans le cadre de consultations, je privilégie mon tarot personnel, le Tarot de Jean Noblet, de taille plus maniable. Cependant, je dois admettre que l’utilisation des cartes de taille standard, mesurant 6,5 x 13 cm, devient de plus en plus contraignante pour moi. Leur manipulation et mélange s’avèrent difficiles, surtout pour ceux qui, comme moi, ont pris l’habitude de formats plus compacts. Cela soulève une question pour les éditeurs de tarot : n’est-il pas temps de proposer des jeux dont les cartes n’excèdent pas 10 cm de hauteur, pour allier confort et tradition ?
Wilfried Houdouin est un graphiste professionnel né en 1971 à Gouvieux, vivant à Marseille depuis 2001. Passionné par le Tarot depuis son adolescence, il dit avoir acquis son premier Tarot de Marseille à l’âge de 19 ans (je suis un peu lassé de ces tarologues ou experts qui se disent être tombés dedans quand ils étaient enfants ou ados, cela ne les rend pas plus légitime !). Formé aux arts graphiques à Paris et certifié en taille de pierre pour les monuments historiques à Angers, il s’est ensuite spécialisé en infographie. Ses recherches en philosophie, art, histoire, géométrie sacrée et cosmologie l’ont conduit à redécouvrir la structure originelle du Tarot de Marseille (selon ses dires), qu’il considère comme un modèle symbolique du monde. Ces découvertes l’ont amené à créer le “Tarot de Marseille Edition Millennium” et à écrire “Le Code Sacré du Tarot”, le premier d’une série de livres sur la métaphysique et la symbolique du Tarot de Marseille.
En outre, il a co-créé avec Yves Reynaud le projet “Tarot de Marseille Heritage”, visant à préserver l’héritage traditionnel du tarot. Son site www.tarot-de-marseille-millennium.com propose une galerie de tarots historiques, intéressante à parcourir.
Le Tarot de Marseille édition Millenium de Wilfried Houdouin s’ouvre sur un livret divisé en plusieurs sections. La première partie plonge le lecteur dans ce que l’auteur nomme la “géométrie sacrée” du Tarot de Marseille. Houdouin y expose ses théories sur la structure secrète et l’iconographie originelle qui l’ont guidé dans la création de son tarot. Il avance que cette structure repose sur la matrice du cube de Métatron, influençant tous les aspects du tarot, de la structure à la graphique, justifiant ainsi la taille des cartes, la grandeur des dessins, les cadres, les lettres, les couleurs, et même l’organisation globale et la métaphysique du jeu. Bien que je puisse concevoir que des maîtres cartiers de la Renaissance aient pu s’inspirer d’une structure graphique pour les scènes des 22 Triomphes (arcanes majeurs), l’idée que cette même structure ait pu déterminer la codification des couleurs, leur usage, ainsi que l’ordre des cartes me paraît exagérée.
La seconde partie du livret, consacrée au langage symbolique du Tarot de Marseille, n’apporte pas beaucoup de nouveautés, tandis que les 14 pages dédiées à l’histoire des cartes et du tarot reprennent des informations déjà connues et sourcées par des historiens reconnus tels que Thierry Depaulis et Isabelle Nadolny.
Houdouin retrace l’histoire des jeux de cartes jusqu’à l’Antiquité, une démarche pertinente compte tenu de la redécouverte de la philosophie antique durant la Renaissance, qui a influencé l’art de l’époque et, par extension, certaines cartes du tarot. Il aborde ensuite l’histoire bien établie des 56 arcanes mineurs en Orient, leur arrivée en Italie ou en Espagne, et la création des 22 arcanes majeurs en Italie avant leur introduction en France. Cette partie, bien documentée, se distingue par sa rigueur, évitant les légendes et mythes persistants autour de l’origine égyptienne du tarot ou des récits sur les tziganes.
Cependant l’auteur remet en question certaines interprétations historiques, suggérant que les historiens, bien que méthodiques, auraient pu méconnaître les codes traditionnels et les aspects originels du tarot, relevant de l’art sacré. Si j'ai bien compris les propos de l'auteur : Il propose une vision où la forme canonique type II aurait été produite plusieurs siècles avant la forme type I, y compris le tarot parisien de 1615, ou encore le tarot de Vieiville de 1650, qui seraient être en réalité une dégénérescence du modèle original (type II), qui serait plus fidèle aux traditions. Il s’appuie sur l’orthographe d’une carte, l’étoile (ici orthographié E-S-T-O-I-L-L-E), pour justifier cette antériorité, une preuve fragile étant donné que l’orthographe française n’était pas standardisée avant la création de l’Académie française en 1634. Autant dire que je ne suis pas du tout convaincu par l’auteur. En fait, j'ai l'impression que Houdouin veut légitimer son travail sur la forme type II et rendre sa création "supérieure" aux autres, en rendant la forme type II antérieure à toutes les autres formes. Encore un tarologue qui brille par son humilité 😕
L’auteur conclut que, bien que l’origine exacte du tarot de Marseille reste incertaine, il penche en faveur d’une naissance en France, peut-être en Provence. Cette théorie est étayée par certains éléments historiques, mais reste à confirmer par des recherches plus approfondies.
Par contre, sur ce point, je suis totalement d'accord avec lui. Le tarot dit "de Marseille" type I et II est né dans le sud-est de la France et non pas en Italie du Nord. Le travail de synthèse et d'aggrégation menant à la forme type I puis type II est caractéristique d'une "french touch".Le livret se poursuit avec une interprétation des 22 arcanes majeurs, offrant des clés de lecture pour chaque carte. Houdouin revisite également la signification des quatre enseignes, attribuant au bâton le rôle de principe créateur et à l’épée celui de principe spirituel, psychique et mental. Il associe le denier au principe physique et corporel, tandis que la coupe incarne le principe spirituel et religieux. Ces interprétations, plus ou moins divergentes des significations traditionnelles, invitent à une réflexion sur les multiples dimensions symboliques du tarot.
Concernant la signification des nombres, l’auteur semble s’inspirer de l’école pythagoricienne pour la signification des nombres de 1 à 10, une approche que je partage également.
Quant aux figures du valet, cavalier, reine et roi, Houdouin reste fidèle à leur représentation historique et médiévale, sans pour autant les ancrer dans un contexte moderne ou psychologique. Cette interprétation classique peut être rassurante pour les puristes, mais elle pourrait également bénéficier d’une mise à jour pour refléter les dynamiques contemporaines sur l'usage du tarot.
Le livret se termine par des instructions sur la pratique du tirage du tarot. Houdouin propose deux méthodes : le tirage dynamique ou vivant et le tirage en croix. Le tirage dynamique, qui utilise trois cartes représentant le passé, le présent et le futur, est flexible et permet l’ajout de cartes supplémentaires pour affiner la lecture. Cette méthode est particulièrement pertinente car, à travers le dialogue avec le consultant, elle permet des cartes supplémentaires en fonction des questions émergentes. Le tirage en croix, quant à lui, est un classique indémodable, avec une cinquième carte obtenue par réduction arithmologique, offrant une synthèse des quatre autres cartes.
En ce qui concerne les particularités du jeu, le Tarot de Marseille édition Millenium respecte la forme canonique du tarot de type II. Cependant, il se distingue par trois éléments notables :
Des mots-clés pour les 78 cartes pour le Tarot de Marseille, à glisser dans votre deck favori. Votre dépliant toujours avec vous, à portée de main, pour vos guider dans vos tirages. Grâce à lui, vos interprétations gagnent en richesse et en finesse.
Le front de l’Ermite, marqué par des rides profondes, semble révéler un troisième œil, symbole de sagesse et de vision intérieure. Cette représentation, bien que présente dans d’autres tarots comme celui de Jodorowsky, est ici exécutée avec finesse. Deuxièmement, la barbe bleue de l’Ermite, contrairement à celle de l’Empereur et du Pape, me semble un choix judicieux. Le bleu, couleur de l’eau, évoque la spiritualité et l’introspection, ce qui correspond parfaitement à l’archétype de l’Ermite, figure de la quête intérieure. La barbe, signe d’expérience, associée à sa couleur bleue, renforce l’idée d’une profondeur spirituelle.
La carte du Pendu attire également mon intérêt. Bien que la couleur verte des montants puisse rappeler la nature et l’espoir, c’est la langue tirée du Pendu qui retient mon attention. Habituellement visible dans les tarots de type I et absente du type II, cette caractéristique est reprise par Houdouin, ce qui semble contradictoire avec son affirmation que le type II est l’original 🤔. Le Pendu tirant la langue suggère qu’il est à l’aise avec sa situation, voire qu’il s’en amuse, acceptant ainsi sa position inversée. De plus, la nudité partielle d’un pied du Pendu est une particularité de ce tarot qui peut symboliser la nécessité de mettre à nu ses liens pour en prendre conscience.
J'apprécie également la carte du Soleil pour son visage vert (au lieu du jaune traditionnel), une couleur qui symbolise l’espoir et la spiritualité. Ce choix attribue au Soleil un message d’espoir et de renouveau spirituel, un choix que je trouve tout aussi pertinent que la couleur jaune habituelle. Je trouve aussi très juste qu'il ait féminisé l'un des deux enfants, se rapprochant en cela de la vision de Jean Noblet, qui en 1650, met un homme et une femme dans sa carte du SOLEIL.
Enfin, la carte du Monde conserve la présence du taureau (en usage dans la forme type I) plutôt que le cheval (souvent présent dans les tarots de type II). L’auréole donnée au taureau (comme aux trois autres figures de la carte) élève l’élément Terre à une nature sacrée et divine, alignée avec les 3 autres éléments (habituellement le cheval dans les type II n'est pas auréolé).
Traditionnellement, la carte de l’Amoureux représente un choix crucial, souvent entre deux personnes ou chemins de vie. Dans cette édition, l’auteur a pris la liberté d’attribuer la main au niveau du bas ventre de la femme à droite, comme la main gauche de celle-ci ; interprétation qui diffère de la forme canonique du Tarot de Marseille où il est généralement admis que c'est la main de l'homme qui pointe vers l'entrejambe de la femme.
Cette inversion est d’autant plus surprenante que Houdouin, qui se vante d'avoir étudié en profondeur les tarots de type II, aurait dû reconnaître que la main au niveau du sexe de la femme, est celle de l’homme symbolisant son désir et son attraction physique pour la première femme. Tandis qu'il regarde la deuxième femme indiquant son attrait plus spirituel et intellectuel pour celle-ci. De plus, l’inversion des positions des deux femmes, avec la femme sage à droite et la femme séduisante à gauche, va à l’encontre de la disposition traditionnelle observée dans les tarots de type I et II.
En conclusion, bien que le Tarot de Marseille édition Millenium présente des qualités indéniables et une approche réfléchie de la cartomancie, il est essentiel de rester vigilant face aux interprétations artistiques qui pourraient s’éloigner des significations traditionnelles. Cela ne diminue en rien le mérite de l’ensemble de l’œuvre, mais invite à une lecture critique et éclairée des cartes, en gardant à l’esprit les fondements historiques et symboliques du tarot.
Il est nécessaire de souligner que l’approche historique de l’auteur, bien qu'intéressante, soulève des débats ou disons ma perplexité. L’affirmation selon laquelle la forme type II serait antérieure à la forme type I (selon la classification de Thierry Depaulis) et remonterait au 14e siècle est une théorie qui mérite une démonstration plus fournie. Certes, celle-ci est sans doute plus approfondie dans ses ouvrages “Le Code Sacré du Tarot de Marseille” et “Les Fondamentaux de l’Histoire du Symbolisme et de la Science du Tarot Philosophale”. Mais le prix de ces livres sont élevés et son argumentation devrait être davantage publique et transparente et non pas assujettis à l'achat de ses écrits.
L’exécution du tarot dans son ensemble est réussie, avec une originalité dans le choix des couleurs qui le distingue du tarot Camoin-Jodorowsky, souvent perçu comme plus ésotérique. Houdouin semble rester fidèle à la forme type II du Tarot de Marseille, à l’exception notable de la carte de l’Amoureux, où j'y trouve une erreur flagrante de compréhension de la forme canonique.
Si je compare ce tarot avec celui de Yoav Bendov, le tarot CBD, mon choix serait délicat. Le tarot CBD respecte également la forme type II sans reproduire l’erreur sur l’Amoureux. Cependant, le style de Bendov, plus moderne et avec des personnages légèrement souriants, contraste avec le choix de Houdouin de visages blancs pour ses personnages (une décision qui mériterait quand même d’être expliquée).
Entre ces deux visions du Tarot de Marseille, mon cœur balance. Je vous invite à partager en commentaire votre préférence personnelle entre ces différentes versions du Tarot de Marseille.
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